« Assurance viol », le coup de grâce contre le droit à l’avortement au Texas

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Une femme habillée en statue de la liberté se tenait devant le Capitole du Texas (chambre législative et siège du gouverneur de cet Etat du Sud des Etats-Unis) pour protester contre cette législature estivale calamiteuse 2017 qui adopte à la châine des textes contre l'Interruption volontaire de grossesse ou les droits des transgenres.

Une femme habillée en statue de la liberté se tenait devant le Capitole du Texas (chambre législative et siège du gouverneur de cet Etat du Sud des Etats-Unis) pour protester contre cette législature estivale calamiteuse 2017 qui adopte à la châine des textes contre l’Interruption volontaire de grossesse ou les droits des transgenres.
(AP Photo/Eric Gay)

Loi après loi, décret après décret, très habilement, les élus du Texas érigent une barrière infranchissable contre l’interruption volontaire de grossesse, un droit pourtant constitutionnel aux Etats-Unis. En imposant une assurance privée obligatoire aux femmes violées ou abusées qui voudraient avorter, en obligeant les médecins de très jeunes filles victimes d’inceste ou d’abus sexuels à déclarer leurs noms si elles veulent avorter, l’Etat du Sud achève d’interdire, de fait, ce droit fondamental.

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Les mots sont choisis avec soin. Les législateurs texans ont appris à louvoyer pour que leurs textes ne soient pas annulés par la Cour suprême des Etats-Unis. Et en ce qui concerne les tentatives de prohibition du droit à l’avortement, ils ont de la constance. Ainsi, dans l’acte voté le 13 août 2017 au Capitol d’Austin, capitale de cet Etat du Sud héritier des plus rétrogrades sécessionnistes, ils s’attaquent à l' »elective abortion » autrement dit l’interruption volontaire de grossesse (IVG), choisie par une femme en raisons de circonstances qui ne regardent qu’elle, toujours un drame comme le rappelait Simone Veil. Ils l’opposent à l’avortement thérapeutique, nécessaire au sauvetage de la vie d’une femme ou imposé par un accident, bref en cas d’urgence absolue, urgences dont la définition texane exclut « le viol, l’inceste, ou les anomalies du foetus« .

Je suis fier d’annoncer qu’une nouvelle loi vient d’être signée afin qu’aucun Texan ne soit obligé de financer une procédure qui met fin à la vie d’un enfant non né
Greg Abbott, gouverneur du Texas

Par ce vote, ils imposent aux Texanes de souscrire une assurance pour couvrir les frais d’une interruption volontaire de grossesse, si elles veulent y recourir dans l’un des derniers établissement qui pratiquent ces opérations au Texas. Le trio d’hommes, au centre duquel trône le gouverneur Abbott à l’origine de cette idée, pose tout sourire sur les réseaux sociaux pour annoncer au monde la « bonne nouvelle » au monde. Il est entouré du sénateur Bryan Hughes et du représentant Jim Murphy. Tous républicains, tendance Donald Trump et Mike Pence, les croisés du combat anti avortement.

Le gouverneur accompagne la photo de ce commentaire : « Avec une foi absolue dans les valeurs du Texas, je suis fier d’annoncer qu’une nouvelle loi vient d’être signée pour s’assurer qu’aucun Texan ne sera obligé de payer (par ses impôts, ndlr) pour une procédure qui met fin à la vie d’un enfant non né. »

Les opposants à cette loi « pro-vie » (par opposition à « pro-choix ») ont eu vite fait de la renommer « l’assurance viol« . Cet internaute s’interroge ironiquement : « Ma famille est composée surtout de femmes. Devrons nous prendre une assurance lorsque nous viendrons au Texas, ou bien est-ce réservé aux résidents ? »

Mais cela ne suffisait pas, et le surlendemain, le même triumvirat par un nouvel acte, le HB 215, sommait les médecins accueillant des mineures en attente d’IVG, à rendre compte dans un rapport détaillé des raisons, des autorisations, des circonstances, avant de permettre l’opération. Parce que « le Texas doit tout faire pour protéger ces jeunes mères« . De quoi décourager encore plus les derniers médecins résistants, bienveillants envers leurs patientes.

Dans le Austin Chronicle, un hebdomadaire « alternatif » selon Wikipedia, la journaliste Mary Tuma, a trouvé un cas d’école pour illustrer ce qu’il en coûtera désormais à celles qui recourront à l’IVG.

Une « taxe de grossesse » à 64 000 dollars

« Scott Ross et Jeni-Putalavage Ross approchent de leur 21ème semaine de grossesse, avec joie. Il s’agit de leur premier enfant. Mais une visite de routine chez le médecin révèle une rare et sévère malformation congénitale du foetus. Leur bébé ne survivra pas après la naissance. Le docteur recommande une interruption de la grossesse, une décision douloureuse à prendre pour le couple. Scott raconte : « Nous étions très angoissés, mais nous avons compris que notre angoisse, physique et mentale, serait encore plus lourde si nous menions le bébé à son terme. » En raison de complications, Jeni a passé sept jours en soins intensifs. Une fois tout accompli, l’addition médicale s’élève à 64 000 dollars. Heureusement, l’assurance de l’employeur couvrait 90% du total. Mais la nouvelle loi change la donne. « Avec cette loi, nous aurions dû tout payer de notre poche. Et en plus de la douleur liée à la perte de l’enfant, nous nous serions retrouvés dans de grandes difficultés financières », dit encore Scott qui voit ce texte comme une « taxe de grossesse ». « C’est tellement dur d’entendre les élus parler d’avortement volontaire – nous n’avons pas voulu avoir un enfant incompatible avec la vie. Comme tous les avortements, c’était imprévu. » »

Imposer de nouvelles restrictions à des femmes déjà prises dans la douleur et une situation difficile, c’est leur procurer encore plus de stress. C’est déraisonnable
Sealy Massingill, médecin en chef auprès de Planned Parenthood

Selon le magazine Broadly, déclinaison « femmes » de « l’empire » Vice, dans les faits, cela ne changera pas forcément grand chose pour deux raisons principales : d’abord parce que la couverture des avortements est déjà très réduite au Texas en raison d’un système d’assurance sociale quasi inexistant ; ensuite parce que les Texanes concernées, souvent paupérisées, ne connaissent pas leurs droits, et par peur d’être stigmatisées ne recourent pas aux assurances éventuelles.

« Dans ces conditions, les femmes qui ont besoin d’une hospitalisation en raison de problèmes médicaux gravissimes sur leur foetus, en particulier quand elles-mêmes sont malades, serons bannies de l’accès aux soins. Imposer de nouvelles restrictions à des femmes déjà prises dans la douleur et une situation difficile, c’est leur procurer encore plus de stress. C’est déraisonnable » se lamente le Dr Sealy Massingill, médecin en chef auprès de Planned Parenthood (l’équivalent américain du Planning familial) du Grand Texas, interrogée par Broadly.

Et selon le Huffington Post, les conséquences des attaques du Texas contre le planning familial, la contraception ou l’IVG sont déjà visibles : la mortalité infantile a doublé depuis cinq ans. Ce qui fait tâche dans un Etat où la vie des mères et de leurs enfants est errigée au statut de religion. #yaduboulot

Suivez Sylvie Braibant sur Twitter > @braibant1