Le gouvernement espagnol capitule en rase campagne

89939d54afc419451a405ec6a26f022f3fbb4b05« Le gouvernement conservateur espagnol a annoncé mardi l’abandon de son projet de loi supprimant le droit à l’avortement, qui avait suscité la polémique jusque dans les rangs du pouvoir, entraînant la démission du ministre de la Justice, porteur du projet. » (AFP)  En voilà une bonne nouvelle ! Et même si nous ne bouderons pas notre plaisir devant cette reculade et la démission d’un ministre ultraconservateur et catholique, bref, en phase avec les franquistes qui existent encore en Espagne, il faut tout de même remarquer deux lacunes notables dans les articles de la presse mainstream annonçant la chose.

1. Rien, ou quasiment rien, à part quelques photos, sur l’énorme mobilisation, en Espagne surtout mais pas seulement, qui a finalement eu raison de cette loi scélérate. Par exemple,  Slate.fr titre : « Avortement : une victoire pour les femmes, mais surtout un fiasco de la droite espagnole ». Quant à Libération, il préfère s’attarder sur les considérations préélectorales de Rajoy, le chef du gouvernement, et sur les rivalités internes à la droite espagnole. Et bien sûr que tout cela a joué. Mais sans l’opposition populaire – des femmes en premier lieu – on peut parier que la loi serait passée.

2. Rien non plus sur les nombreux mouvements antiavortement menés par les droites néoconservatrices et leurs jumelles extrêmes, entre autres aux États-Unis et en France… Dans ce contexte, la victoire des femmes espagnoles est d’autant plus importante.

Un lien vers une petite vidéo sur le mouvement en Espagne : https://www.youtube.com/watch?v=rGiBnTHGP4U

C’est comme une guerre

 

C’est comme une guerre

08 MARS 2014 |  PAR JEAN-PHILIPPE CAZIER

Je n’ignore pas être animée d’une volonté rageuse de rendre improductif mon bas ventre. Je sécrète des maladies produites par cette volonté qui ne m’est pas en propre mais est le résultat de l’air que j’avale. Ces maladies sont issues de mon imagination. Mon imagination est issue des multiples corps qui ont multiplié mon imagination. Je suis une extension de l’imagination des autres, ce qui étend nos corps hors de tout contour. Chaque corps de l’autre étend autant de corps que d’imagination. Chaque corps refigure le corps. Chaque corps de l’autre étend autant de corps que d’imagination. Que par des langues propres on cherche à occuper, des langues non mystérieuses faites par des maladies non mystérieuses parce que saines et produites par la syntaxe droite. C’est une sorte de guerre. C’est comme une guerre. La syntaxe droite est l’idée droite qui capture les corps et les occupe. Elle fabrique des corps fermés prêts à entrer dans les tombeaux de ses guerres économiques. La syntaxe droite a besoin de la nature pour rendre opératoire et naturelle l’idéologie coloniale ou patriarcale ou encore patronale. Elle produit des idées naturelles pour asseoir son droit naturel. La vie naturelle est donc une production de la syntaxe droite. La syntaxe straight opère par occupation des esprits et des corps. De toutes les béances, la syntaxe droite en a trouvé une qui assure le pouvoir naturel. Le mot d’ordre de la syntaxe straight est donc l’occupation de l’utérus, c’est par là qu’elle poursuit la procréation de sa loi. Pour garantir son droit naturel elle fait de ce lieu un territoire qui garantit la vie naturelle. Les corps possédant un utérus sont ainsi expropriés par la vie absolue produite par le droit naturel et la syntaxe droite. Les siècles ont cousu les corps pour en fermer chaque trou. C’est aux béances les plus visibles du corps que l’idéologie dominante s’attaque et c’est par elle que toujours elle entre. Sa façon d’attaquer et de pourchasser les femmes voilées tient de la même manie que celle qui consiste à habiter le ventre des femmes. En faisant de la femme une vie faite pour la vie on trouve par là de quoi retirer la vie, ses droits, ses libertés, son corps. Et la possibilité d’un commun, puisque la voici tellement faite pour la vie qu’elle se trouve jetée hors de celle-ci et de son organisation. C’est donc comme une guerre. Oui, c’est une guerre. Contre les corps, car le corps n’existe pas. Le corps n’existe que par les devenirs dans lesquels il est pris : devenir-femme, devenir-animal, devenir-arabe, devenir-bouche. Toujours des devenirs qui défont le corps et l’ouvrent à une altérité qu’il n’est pas, qu’il n’est jamais. Même le corps du Christ est multiple et pris dans des devenirs : mangez mon corps, buvez mon corps, je suis mort, je suis vivant, crucifiez-moi. La bouche ne sert pas qu’à manger, elle est prise dans des mouvements étranges. Elle parle, elle suce et lèche, elle embrasse et mord – et elle peut embrasser et mordre en même temps. Mon corps aime avoir une bite dans le cul, c’est-à-dire aussi dans le cerveau et partout à travers mes nerfs comme à travers les tiens, mon amour. Les corps sont singuliers, mobiles, toujours ouverts, cosmiques. L’Etat ou l’Eglise ne cessent de vouloir identifier nos corps, les réduire à un corps figé, ordonné selon des impératifs qui ne sont pas ceux du corps mais de l’argent, des valeurs morales, de la police, de la patrie, de la Nation. Les groupes fascisants qui défilent et s’acharnent contre nos corps veulent la même chose : transformer nos corps en tombeaux, en choses mortes, sans futur ni joie. Ces mouvements réactionnaires, violents d’une violence qui s’organise et dont nous n’avons pas encore commencé à mesurer concrètement le degré, veulent imposer un ordre aux corps, un ordre immuable, fixe. Un ordre raciste, nationaliste, haineux, effrayé. Un ordre mortifère. Ce qu’ils veulent, c’est nous tuer, c’est ce qu’ils veulent précisément : en Russie, en Espagne, en France – tuer des corps, tuer des gens. C’est ce qu’ils font et c’est ce qu’ils feront. C’est donc une guerre. Une guerre contre nos corps. Mélanger nos corps. Par la bouche, les mélanger par la peau. Mélanger nos corps par le sexe, par la peau, par les mains. Mélanger nos corps déjà mélangés. Par la bouche, par la peau, par le sexe, par les yeux. Que les corps suintent. Que les corps s’écoulent, saignent. Que les corps submergent, nos corps submergés. Nos corps esclaves. Par la bouche, par la peau, par le sang, par les mains, par le sexe. Révolte révolte révolte.

Texte de Liliane Giraudon, Frank Smith, Amandine André et Jean-Philippe Cazier trouvé sur Mediapart.

Violences contre les femmes dans le monde

 

À lire sur le site Encore féministes !

1. Quelques données chiffrées concernant les violences masculines contre les femmes
éléments rassemblés par Hélène Marquié et Clara Domingues
2. Les violences envers les femmes : là où l’autre monde doit agir.
texte de la Marche mondiale des femmes, décembre 2001
3. Lettre du Collectif Féministe Contre le Viol (France) au ministre de la Justice sur la prise en charge des victimes, 19 juillet 2002
4. OMS : premier rapport mondial sur la violence et la santé dans le monde, oct. 02 (extraits)
5. Violences conjugales (rapport d’OLga Keltosova au Conseil de l’Europe, sept. 02)
6. Chiffres clés de la violence contre les femmes à la maison en Europe.
7. L’OMS vient en aide aux femmes battues

Pour y aller, cliquer ici.

Agressions sexuelles en France

Agressions sexuelles en France : quelques données statistiques

– Loi qui criminalise le viol : 1978

Redéfinition, huis clos à la demande de la victime, associations partie civile, et sanctions aggravées : 1980  viol« tout acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu’il soit, commis sur la personne d’autrui par violence, contrainte, menace ou surprise »

– Viol de guerre = crime contre l’humanité : 1996 (TPI Rwanda et ex-Yougoslavie)

– Viol conjugal : 2006

 75 000 viols par an en France (200 par jour)

16% seulement des victimes portent plainte ; 4% signalent à la police un rapport sexuel forcé

 20% de femmes (1/6) sont victimes d’agressions sexuelles au cours de leur existence

1 femme meurt tous les 2 j ½ victime de violences conjugales

 Âge des victimes de viol : de 2 mois à 90 ans ; pic d’âge : 9 ans en moyenne

 98% des agresseurs sont de sexe masculin  / 80% des victimes sont de sexe féminin

 50% des agresseurs sont mariés ou en union de fait

 70% des viols sont prémédités

 3% des agresseurs sont des déséquilibrés

 2% des violeurs sont condamnés (en 2008, 43% des peines sup. à 10 ans de prison ; 18% en 1984)

 83% des victimes connaissaient leurs agresseurs

 47% des viols ont lieu dans la famille élargie et 63% des femmes violées le sont dans l’enfance et l’adolescence

17% des viols sont commis par des collègues, des voisins

10% par des connaissances récentes ; 17% par des inconnus

Le viol touche tous les milieux sociaux, sans distinction d’âge ou d’origine géographique ; en 2008, 46% des crimes sont des viols

En Europe, 16 états / 27 disposent de plans d’action gouvernementaux contre le viol.

 84 % des 80 000 appels reçus au « 3919 » (tél. Violences) = violences psychologiques. Création du Délit de harcèlement psychologique (Loi n° 2010-769 du 9 juillet 2010).

Sources .

. Gisèle Halimi, La Clause de l’Européenne la plus favorisée, Paris, des femmes, 2008.

. Étude des sociologues Véronique Le Goaziou et Laurent Muchielli, CNRS, 2010.

. Prune de Montvalon, Les violences faites aux femmes en France, une affaire d’État, Amnesty International, 2006.

. Clémentine Autain, Un beau jour… Combattre le viol, Indigène éditions, 2011.

– Sites : Mix-Cité; http://www.clef-femmes.fr ; epacvaw.org ; www.wikigender.org ; CIDFF ; www.choisirlacausedesfemmes.org ; Observatoire européen : http://www.observateurocde.org ; Amnistie Internationale Femmes ; www.vday.org (Eve Ensler / Mvt mondial # violences faites aux femmes).

Le « point du mari »

Cet article est extrait du blog Chroniques d’une sage femme désœuvrée.

Le « point du mari »

Lorsqu’on est désœuvrée, on a tendance à passer beaucoup de temps sur les réseaux sociaux, histoire de ne pas rompre le contact avec le monde de la santé et ses consœurs et confrères. C’est pourquoi j’ai été une des premières au courant de cette histoire de Point du Mari.

Née d’une anecdote racontée par une collègue et qui a choqué bon nombre d’entre nous, cette histoire a quitté le sphère « intime » de la page privée pour se répandre sur le net lorsque Agnès Ledig, sage-femme et auteur, a utilisé sa plume pour mettre des mots sur cet acte. (Vous pouvez trouver le texte ici) L’indignation, l’horreur, la méfiance se sont répandus à vitesse grand V sur la toile et parmi les groupes de femmes, de parents, de professionnel de la santé. (#PointDuMari sur Twitter)

Parmi ces derniers, nombreux sont ceux qui ignoraient cette pratique (heureux soient-ils !) et nombreux également à ne pas comprendre comment cela pouvait exister et pourquoi d’autres laissaient faire sans rien dire. Je vais essayer de répondre à ces deux questions.

Je vais commencer par vous narrer comment on m’a appris la suture dans mon école de sages-femmes, en vous précisant que ce sont des cours assurés par une sage-femme et qu’elle nous apprend donc ce qu’elle a elle-même appris. Il est donc évident que d’une sage-femme à l’autre, d’une école à l’autre, le contenu de ce cours est très varié.
Dans mon cas, le cous a été très technique : « on suture tel plan avec tel plan, on s’assure de la conformité anatomique ». Au cours de son exposé, la sage-femme a ajouté « et si besoin, on peut parfois rajouter un point en plus pour atténuer la béance vaginale consécutive à l’accouchement ». Rien de bien précis, nous sommes ensuite passés sur nos blocs de mousse pour nous entrainer à tenir nos pinces et faire nos nœuds.

Autant dire que lorsque j’ai assisté à ma première reprise de suture, je découvrais un monde complètement nouveau.

J’ai finalement appris à suturer avec différents maitres :
– le plus souvent, on m’apprenait à « serrer suffisamment pour que ça tienne mais pas trop pour que cela ne lui fasse pas mal ». Dans ces cas-là, personne pour nous préciser si l’on parlait de douleurs post-partum ou plus tardives, liées à l’accouchement ou à la sexualité et dans ma grande candeur de cette époque, je ne m’étais pas particulièrement posée la question.
– d’autres préconisaient de « bien serrer pour pas que ça lâche ». Alors, je serrais. Et comme mon stage ne me permettait pas toujours de revoir mes patientes, j’ignorais alors quel avait été leur vécu par la suite.
– enfin, certains rajoutaient ce fameux point évoqué en cours, avec parfois, pas toujours, une remarque plus ou moins anodine : « Monsieur appréciera ». Dans ma grande candeur (bis), là non plus je ne posais pas de question.

Aujourd’hui, on pourrait s’étonner de mon manque de réaction.
Il venait en premier de ma grande ignorance personnelle des relations sexuelles. Je n’avais aucune expérience pratique de ce genre de choses. Je ne connaissais donc pas ces douleurs qui peuvent arriver au cours d’un rapport, quelle était la part du masculin et du féminin, la part du psychique et du physique. Candide et innocente j’étais.
Le programme scolaire ne m’aidait pas non plus. En effet, la sexologie n’était abordée qu’au cours de la dernière année d’étude. Je suturais donc depuis plus de trois ans déjà des périnées lorsqu’on m’a parlé pour la première fois de ces conséquences.
Ensuite, il faut comprendre qu’au cours de nos stages, je voyais beaucoup de périnées… mais des périnées fraichement « accouché ». Je n’avais comme vision de la normalité que ces vulves béantes d’avoir laissé passer un enfant. Ce n’est là aussi qu’en dernière année que j’ai pu découvrir d’autres périnées, lors de mon stage (optionnel) chez une sage-femme libérale qui pratiquait la rééducation du périnée.
Tout ceci cumulé faisait que, finalement, ce point de resserrage pour rendre un peu d’étroitesse à un vagin ne me choquait pas plus que ça et me paraissait presque logique.

Il faut également ajouter un autre facteur : l’ambiance dans les maternité était à l’obéissance. Évidemment en tant qu’étudiante mais même plus tard, lorsqu’un médecin (ou quelqu’un ayant plus d’expérience que moi) me disait de faire un point en plus, j’obéissais, me disant que si cela m’était demandé, c’est que c’était nécessaire.
Les femmes étaient également dans cette optique, accouchant sur le dos bien gentiment, acquiesçant à tout ce qu’un professionnel de santé, un « sachant » leur disait.

Tout ceci pour expliquer pourquoi « nous laissions faire ».

Depuis, les choses ont changé. J’ai pour ma part évolué, pris du recul sur ma pratique et ses conséquences, perdu mon innocence et ai compris ce qui était le plus important : la femme, et qu’elle était la mieux placée pour me dire ce qui lui convenait, à elle.
Les femmes également ont changé, demandant à être partie prenante de leur accouchement.
La physiologie et le respect ont réinvesti les salles d’accouchement.

Voilà pourquoi aujourd’hui une telle affaire peut éclater, parce que la parole des soignants et des femmes s’est libérée.

Pour autant, il reste notre première question : pourquoi certains se sont autorisés à pratiquer ce fameux point ?
Est-ce par ignorance comme c’était mon cas ? Peut-être. Mais lorsque l’on se permet de rajouter ce fameux « monsieur appréciera » c’est qu’il y a une autre volonté.
Un « madame appréciera » aurait pu traduire une vraie maladresse, la pensée que ce point allait aider les femmes dans leur sexualité future. Oui, même si ce n’était pas le cas, mais au moins, l’intention aurait pu être bonne.

Or, non, c’est Monsieur qui est censé apprécier la nouvelle anatomie de sa compagne. Et le dire ainsi, c’est bien sous-entendre que la sexualité de l’homme est supérieure à celle de la femme. Et que le corps de la femme n’est là que pour son bon plaisir, son bon vouloir. Quitte à le mutiler comme c’est le cas lorsqu’on pratique ce « point du mari ».
Je ne suis pas sociologue, je ne m’aventurerais pas à faire une analyse poussée de ce qui est manifestement de la misogynie. Je vais plutôt me pencher sur la vision de la médecine.

Lorsqu’on évoque le cas du « point du mari », c’est explicitement la sexualité de la femme qui est niée. Mais si l’on se penche sur les actes médicaux effectués sur les femmes en général, c’est carrément leur identité qui est bafouée.

Certains professionnels de santé parlent aux femmes comme si elles étaient des enfants « Quoi ? Un stérilet ? Vous n’y pensez pas ! »
Certains professionnels de santé se permettent des actes qu’ils n’aimeraient pas qu’on leur fasse « je vous fais le toucher vaginal pendant que mon interne vous prend la tension, on perd moins de temps » (le sous-entendu étant limpide, on perd son temps à examiner une femme ou à lui prendre la tension donc autant tout faire en même temps, sans le moindre respect pour ce que ce mépris inspire à la patiente, devenue un véritable objet – sans parler de l’objectivité d’une tension prise dans de telles conditions).
Certains professionnels de santé ignorent tout bonnement l’affect de leurs patientes « mais non, je vous fais pas mal en vous examinant, et pis bon, après tout, faut bien que je vois comment est placé ce bébé, serrez les dents voyons ! ».
Certains professionnels de santé oublient la base de la médecine à savoir le libre consentement des patients « quoi ? vous ne vouliez pas d’épisiotomie ? Ah, mais je vous en ai fait une de toute façon »
Certains professionnels de santé vous demandent de vous mettre complètement nue pour un simple prélèvement vaginal.
Certains professionnels ne suivent pas les recommandations de la Haute Autorité de Santé (référence donc) parce que eux, pensent différemment. Et les femmes se retrouvent donc avec des frottis tous les ans à partir de 15 ans. Ou d’autres se voient retirer leurs seins à 85 ans, subir une chimiothérapie et ses horreurs parce qu’un professionnel de santé aura outrepassé les recommandations et décidé de pratiquer une mammographie malgré tout.

Ceci n’étant que des exemples parmi d’autres.

Comment, pourquoi des professionnels de santé, qu’ils soient homme ou femme, osent-ils se permettre ce genre de comportement ?
Parce que c’est ce qu’on nous enseigne pendant nos études : nous sommes l’élite, nous soignons des gens, nous sauvons des vies, donc nous pouvons nous permettre de juger ce qui est bon ou ne l’est pas. Quitte à être maltraitant. Quitte à être misogyne.
Parce que c’est ce que nous « demande » la société (ou du moins ce qu’elle nous demandait jusque il y a peu de temps). Le médecin était considéré comme un notable, à l’égal du curé ou du maire. Aujourd’hui, la pénurie dans certaines régions fait qu’il n’y a plus de réel choix du praticien ou alors que le délai pour un rendez-vous est tellement long qu’on est prêt à se plier à tout pour pouvoir être pris en charge, fusse à notre propre détriment.
Cela touche plus les femmes que les hommes car trop longtemps, elles, nous avons été infantilisées et diminuées.

Il est aujourd’hui temps d’ouvrir les yeux et de ne plus l’accepter. En cela, le « point du mari » sera-t-il finalement salutaire.

Le temps des bûchers

Voici un texte de Starhawk extrait de Femmes, magie et politique.

« Elle a peur. Sa peur a une odeur plus forte que les aiguilles de pin que foulent ses pieds sur le sentier de la forêt. La terre fume après la pluie de printemps. Son propre cœur est plus sonore que le meuglement du bétail sur le pré communal. La vieille femme porte un panier d’herbes et de racines qu’elle a arrachées ; il semble, à son bras, lourd comme le temps. Ses pieds sur le sentier sont les pieds de sa mère, de sa grand-mère, de son arrière-grand-mère. Cela fait des siècles qu’elle marche sous ces chênes et ces pins, qu’elle cueille des herbes et les rapporte pour les sécher sous les avancées du toit de sa chaumière sur le pré communal. Depuis toujours les gens du village viennent à elle ; ses mains sont des mains qui guérissent, elles peuvent retourner l’enfant dans le ventre de sa mère; sa voix murmurante charme la souffrance et la chasse, ou berce l’insomniaque jusqu’au sommeil. Elle croit qu’elle a du sang de fée dans les veines, le sang de l’Ancienne Race qui élevait des pierres vers le ciel et ne construisait pas d’églises. À la pensée de l’église, elle frissonne; elle se souvient de son rêve de la nuit précédente — le papier cloué sur la porte de l’église. Elle ne pouvait pas le lire. Qu’est-ce que c’était? La proclamation d’une chasse aux sorcières ? Elle se passe les mains sur les yeux. Ces jours-ci, la Vision est un malheur; ses rêves sont hantés par les visages de femmes torturées ; leurs yeux sans sommeil, les paupières lourdes tandis qu’elles doivent marcher, monter et redescendre, nuit après nuit, affaiblies par la faim, les corps rasés et offerts en spectacle à la foule, transpercés pour trouver la preuve qu’ils appellent les marques du diable, puis pris pour l’amusement privé des geôliers. Et ils étaient doux en Angleterre où les sorcières étaient seulement pendues. Elle pense aux récits, murmurés à des réunions, venant d’Allemagne et de France, et parlant de mécanismes pour leur écraser les os et leur désarticuler les membres, de veines déchirées et de sang répandu dans la poussière, de chair carbonisée tandis que les flammes s’élèvent autour du bûcher. Pourrait-elle garder le silence sous cette torture — ou se briserait-elle, avouerait-elle n’importe quoi, dénoncerait-elle comme ses compagnes sorcières n’importe qui, toutes celles qu’ils veulent ? Elle ne sait pas, elle espère qu’elle ne saura jamais. »

La suite par ici : buchersexcav – copie

« Oui mais quand même, la religion c’est mal »

« Oui mais quand même, la religion c’est mal. » Montée de l’islamophobie et banalisation du fémonationalisme.

Voici un article de Mona Chollet sur son site Périphéries. Le début donne le ton : « Relayer l’information de la énième agression d’une femme voilée, ou les propos haineux tenus sur l’islam par la représentante d’une organisation pseudo-féministe, revient immanquablement à emboucher l’appeau à trolls religiophobes. Que des femmes soient insultées et tabassées, que le féminisme serve de leurre pour répandre et banaliser le racisme le plus crasse, tout cela, le/la religiophobe s’en moque : dans un pays où médias et politiques, de façon plus ou moins insidieuse, désignent à longueur de temps les musulmans comme la cause de tous les maux de la société, son seul sujet d’anxiété est que son droit à « critiquer la religion » soit garanti. Pour l’exprimer, il usera de subtiles gradations dans la virulence, de la simple protestation à l’éructation scatologique probablement censée traduire la hauteur à laquelle il plane dans l’éther philosophique inaccessible aux benêts qui voient du racisme partout : « Moi, je chie sur toutes les religions. » » Voir tout le texte par ici : http://www.peripheries.net/article335.html